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Tài liệu Nghiên cứu đối chiếu tính thời gian trong tiếng việt và tiếng pháp áp dụng phương pháp tiếp cận ngữ dụng ngữ nghĩa học

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UNIVERSITÉ DE HANOI DÉPARTEMENT D’ÉTUDES POST-UNIVERSITAIRES ÉTUDE CONTRASTIVE DE LA TEMPORALITÉ EN FRANÇAIS ET EN VIETNAMIEN Application de l’approche pragmatico-sémantique THÈSE Présentée par NGUYEN Duc Nam Sous la direction du Professeur VU Van Dai en vue de l’obtention du grade de Docteur en linguistique Hanoi, 2014 Remerciements Mes remerciements vont d’abord au professeur Vũ Văn Đại qui a accepté de diriger mon travail de recherche. Je le remercie pour sa patience ainsi que pour ses conseils me permettant de mener à bien cette recherche dont l’élaboration est plus longue que d’habitude en raison de mes occupations professionnelles. Sans lui, je n’arriverais pas à la finir. Je tiens ensuite à remercier mes parents et mes proches pour m’avoir soutenu moralement et physiquement dans la préparation de cette thèse. Sans eux, je ne pourrais pas l’achever. 2 Attestation sur l’honneur J’atteste sur l’honneur que cette thèse a été élaborée par moimême et que les données et les résultats présentés sont exacts et n’ont jamais été publiés ailleurs. Nguyen Duc Nam 3 Table des matières Table des matières 1 Liste des figures 5 Liste des tableaux 6 Abréviations 8 Introduction 9 1. Justification de l’étude 9 2. État actuel des recherches 11 3. Questions de recherche 15 4. Objectifs et délimitation de l’étude 15 5. Structure de la thèse 17 6. Méthodologie de recherche 18 Première partie Cadre théorique 22 Chapitre 1 23 1.1 Question du temps Conceptions du temps d’après Reichenbach (1947), Co Vet (1980) et Comrie (1985) 23 1.2 Conception du temps d'après Klein(1994) 31 1.3 Nature de l’intervalle d’assertion 33 1.4 Détermination de l’intervalle d’assertion 35 1.5 Bilan du chapitre 37 Aspect 38 2.1 Aspect lexical 38 2.2 Aspect grammatical 43 2.3 Relations entre l'aspect lexical et l'aspect grammatical 46 2.4 Bilan du chapitre 47 Chapitre 2 1 Conclusion de la première partie 48 Deuxième partie Analyse de la temporalité en français 50 Chapitre 3 Analyse des formes verbales de l’indicatif 52 3.1 Présent indicatif 52 3.2 Passé simple 57 3.3 Imparfait 59 3.4 Futur simple 63 3.5 Passé composé 64 3.6 Plus-que-parfait 66 3.7 Passé antérieur 68 3.8 Futur antérieur 68 3.9 Bilan du chapitre 69 Analyse du corpus 71 4.1 Description du corpus 71 4.2 Présent de l’indicatif 77 4.3 Imparfait 80 4.4 Passé simple 81 4.5 Passé composé. 82 4.6 Plus -que –parfait 84 4.7 Futur simple 85 4.8 Bilan du chapitre 85 Chapitre 4 Conclusion de la deuxième partie 87 Troisième partie Analyse de la temporalité en vietnamien 89 Chapitre 5 90 5.1 État de lieu des recherches sur la temporalité en vietnamien Première tendance : absence des moyens de représentation du temps et de l’aspect en vietnamien 5.2 91 Deuxième tendance : présence des moyens de représentation du temps en vietnamien 5.3 92 Troisième tendance : Présence des moyens de représentation de l'aspect en vietnamien 94 2 5.4 Quatrième tendance : Présence des moyens de représentation du temps et de l'aspect en vietnamien 5.5 94 Revue des études contrastives sur la temporalité en vietnamien et en d'autres langues 95 5.6 Remarques sur les études précédentes 101 5.7 Bilan du chapitre 105 Valeurs des marqueurs «đã », « đang», « sẽ » et absence des marqueurs 106 6.1 Marqueur «đã » 106 6.2 Marqueur «đang» 113 6.3 Marqueurs « sẽ» 118 6.4 Absence des marqueurs. 120 6.5 Bilan du chapitre 122 Analyse du corpus en vietnamien 123 7.1 Description du corpus 123 7.2 Résultats préliminaires de l’analyse quantitative 124 7.3 Marqueur « đã » 129 7.4 Groupe « đã từng ». 130 7.5 Marqueur « đang » 131 7.6 Marqueur « sẽ» 132 7.7 Absence des marqueurs 133 7.8 Bilan du chapitre 135 Chapitre 6 Chapitre 7 Quatrième partie Analyse contrastive des systèmes de représentation temporelle et aspectuelle des deux langues 136 1. Objectifs de cette analyse 136 2. Méthodologie d’analyse contrastive 137 Chapitre 8 Analyse contrastive des deux systèmes de représentation temporelle et aspectuelle en français et en vietnamien 139 8.1 Différences de représentation temporelle 139 8.2 Différences de représentation de l’aspect grammatical 142 8.3 Moyens de représentation temporelle et aspectuelle 143 3 8.4 Bilan du chapitre 144 Analyse du corpus vietnamien- français 145 9.1 Présentation des corpus et paramètres d’analyse 145 9.2 Analyse des corpus vietnamien-français 145 9.3 Analyse des corpus français-vietnamien 150 9.4 Bilan du chapitre 155 Chapitre 9 Conclusion de la quatrième partie 156 Conclusion générale 158 Bibliographie 166 1. Ouvrages en français et en anglais 166 2. Ouvrages en vietnamien 169 3. Corpus 170 Annexe 171 4 Liste des figures Figure 1 : Système de Co Vet .............................................................................................. 27 Figure 2: Aspect prospectif .................................................................................................. 45 Figure 3 : Aspect rétrospectif............................................................................................... 45 Figure 4 : Aspect imperfectif ............................................................................................... 45 Figure 5 : Aspect perfectif ................................................................................................... 46 Figure 6 : Aspect aoristique ................................................................................................. 46 5 Liste des tableaux Tableau 1 : Système de Reichenbach .................................................................................. 24 Tableau 2 : Catégorisation des procès d'après Vendler ....................................................... 39 Tableau 3 : Autres possibilités ............................................................................................. 39 Tableau 4 : Modification du système de Vendler ................................................................ 42 Tableau 5 : Catégorisation des procès d'après M.B. Olsen .................................................. 42 Tableau 6 : Récapitulation des valeurs temporelles et aspectuelles des formes verbales en français ......................................................................................................................... 70 Tableau 7 : Grille d’analyse de la temporalité en français .................................................. 72 Tableau 8 : Répartition des catégories de procès ................................................................. 73 Tableau 9 : Répartition des formes verbales dans le corpus. ............................................... 73 Tableau 10 : Répartition des échantillons suivant les catégories de textes. ........................ 73 Tableau 11 : Répartition des échantillons suivant les catégories de proposition................. 74 Tableau 12 : Répartition des formes verbales en fonction des catégories de procès ........... 74 Tableau 13 : Répartition des formes verbales en fonction des valeurs temporelles. ........... 74 Tableau 14 : Répartition des formes verbales en fonction de leurs valeurs aspectuelles ... 75 Tableau 15 : Répartition des formes verbales en fonction de leurs interprétations ............. 75 Tableau 16 : Répartition des valeurs temporelles et aspectuelles du passé composé .......... 84 Tableau 17 : Répartition des marqueurs suivant les genres de texte (statistiques faites par Nguyen Kim Than) .................................................................................................... 120 Tableau 18 : Répartition des échantillons par types de texte ............................................. 124 Tableau 19 : Répartition des marqueurs suivant les types de texte. .................................. 124 Tableau 20 : Répartition par types de proposition ............................................................. 125 Tableau 21 : Taux d’absence des marqueurs suivant les types de proposition .................. 125 Tableau 22 : Répartition des types de procès .................................................................... 126 Tableau 23 : Répartition des marqueurs par types de procès ............................................ 126 Tableau 24 : Répartition des circonstanciels de temps ...................................................... 126 Tableau 25 : Répartition des circonstanciels de temps par types de texte ......................... 126 Tableau 26 : Répartition des circonstanciels de temps par marqueurs .............................. 127 Tableau 27 : Répartition des marqueurs préverbaux ......................................................... 127 Tableau 28 : Répartition des valeurs temporelles des marqueurs préverbaux ................... 127 6 Tableau 29 : Répartition des marqueurs par valeurs aspectuelles ..................................... 127 Tableau 30 : Répartition des emplois des marqueurs par interprétations ......................... 128 Tableau 31 : Répartition des procès sans marqueurs suivant leurs valeurs temporelles .. 134 Tableau 32 : Répartition des procès sans marqueurs suivant leurs valeurs aspectuelles .. 134 Tableau 33 : Répartition des procès sans marqueurs suivant leurs interprétations temporelles ................................................................................................................. 134 Tableau 34: Correspondance entre les marqueurs préverbaux en vietnamien et les formes de l’indicatif en français ............................................................................................ 146 Tableau 35 : Répartition des formes verbales correspondant au « đã » par types de procès ................................................................................................................................... 146 Tableau 36 : Répartition les formes correspondant aux échantillons sans marqueurs en vietnamien suivant les types de procès ...................................................................... 149 Tableau 37 : Correspondants des formes verbales de l’indicatif français aux marqueurs vietnamiens ................................................................................................................ 150 Tableau 38 : Répartition des marqueurs vietnamiens suivant les types de procès des échantillons source en français .................................................................................. 151 7 Abréviations Signe S R E IE IA IP = < > ∩ -----------+++++++++ [ ] -------------++++++++++ Valeur ou interprétations Temps de l’énonciation d’après Reichenbach, Comrie Temps de référence d’après Reichenbach, Comrie Temps de l’événement d’après Reichenbach, Comrie Intervalle de l’énonciation d’après Klein Intervalle d’assertion d’après Klein Intervalle du procès d’après Klein Relation de coïncidence Relation d’antériorité Relation de postériorité Relation d’intersection Représentation du procès lexical Ligne de temps Représentation du temps dans lequel le procès prend place Représentation du temps de l’intervalle d’assertion Représentation de la structure temporelle du procès de type deux états dont celui de source et celui de cible 8 Introduction 1. Justification de l’étude Avec l’espace, le temps fait partie des traits inhérents de la communication entre les êtres humains. Un message émis contient toujours des informations permettant de préciser les caractéristiques temporelles de la situation en question. Dans le cas contraire, en absence des informations temporelles, le message risque d’être incompréhensible. Ce phénomène est expliqué par le fait que toute existence ne l’est que dans le temps et dans l’espace et que le monde et ses changements ne sont perceptibles par l’homme qu’en étant mis dans ces deux dimensions. Il est donc impossible de se faire comprendre si l’on veut parler d’un fait sans indiquer quand ni où il prend place et comment il se déroule. Les données temporelles sont encodées d’après un mécanisme très complexe. Il implique plusieurs éléments lexicaux et/ou grammaticaux. On peut en mentionner entre autres, le verbe et ses compléments, la morphologie verbale (pour les langues qui n’ont pas de formes verbales, il s’agit des particules, des suffixes verbaux1), les circonstanciels temporels dont les adverbes de temps2. Ces éléments vont se combiner dans un énoncé d’après les règles bien définies et propres à chaque langue. Il est à remarquer qu’ils entretiennent une relation interactionnelle entre eux et que l’un contraint l’interprétation de l’autre et vice versa ainsi que celle de l’ensemble. Pour décoder les données temporelles d’un énoncé particulier, l’auditeur (ou le lecteur en cas d’un document écrit) doit tenir compte, d’une part, de la valeur sémantique de chaque élément en relation avec son entourage et d’autre part des facteurs contextuels. Ces derniers imposent certaines contraintes dans l’interprétation temporelle de l’énoncé. C’est en raison de sa complexité que dès l’antiquité, la temporalité des langues a fait l’objet d’étude de tant de savants dont Aristote. Ce dernier mentionne la présence et l’utilisation des formes verbales servant à indiquer le moment où a lieu la situation décrite. Cependant, ce savant n’arrive pas à expliquer pourquoi le grec ancien a besoin de plus de trois formes verbales tandis que le temps se décline en trois dimensions, à savoir le passé, 1 La question des particules et des suffixes verbales sera développée dans notre travail portant sur la temporalité en vietnamien. 2 On peut voir les relations interphrastiques, les relations de cause et de conséquences dans une autre étude. 9 le présent, le futur et que chaque forme verbale sert à représenter une dimension ou un temps. La même question peut se poser pour le français. Pour représenter le passé, cette langue a six formes verbales dont le passé récent, le passé composé, le passé simple, l’imparfait, le plus-que-parfait, le passé antérieur sans compter le passé surcomposé qui n’est plus d’'emploi courant. Outre la question sur la nature des formes verbales, les chercheurs doivent faire face à d’autres non moins difficiles. Pour le français, pourquoi accepte-t-on facilement l’énoncé « On a trouvé la clé » tandis que celui de « on trouvait la clé » demande un contexte particulier pour être grammaticalement correct ? Ou pourquoi peut-on dire « le livre est en français » et non pas « le livre a été en français » ? Pour le vietnamien, quelle est la raison pour laquelle les énoncés tels que « Cô ấy đã trẻ » ou « Bạn ấy đang hiểu vấn đề » sont réfutés ou mis en doute par les Vietnamiens. D’autres questions peuvent se poser si on compare le français avec le vietnamien. En français, les informations temporelles et aspectuelles de l’action décrite par un énoncé sont représentées essentiellement et obligatoirement par les formes verbales. Par contre, les mots comme «đã », « đang », « sẽ » qualifiés comme marqueurs de temps en vietnamien ont un usage qui semble non obligatoire. Les deux énoncés « tôi ăn cơm » et « tôi đang ăn cơm » ont souvent la même traduction en français « je mange du riz». De plus, la détermination de leur valeur reste encore non résolue par les linguistes. Donc, quelles sont les divergences et les convergences entre les systèmes de représentation temporelle et aspectuelle de ces deux langues? Pour y répondre, dans le cadre de cette thèse, nous ferons une analyse contrastive de ces deux systèmes. Notre travail se limite à l’étude des formes verbales du mode indicatif en français et les marqueurs préverbaux en vietnamien. Nous espérons que les résultats de notre travail pourraient contribuer à une présentation plus claire et plus opératoire du mécanisme d’encodage des informations temporelles en français et en vietnamien. Et par ce fait, nous pouvons réduire des difficultés et rendre plus facile l’apprentissage du français chez les apprenants vietnamiens. Dans ce qui suit, nous ferons une brève description des questions d’ordre théorique qui intéressent jusqu’à présent les linguistes ainsi que ceux avec des conceptions dites traditionnelles. À partir de là, nous présenterons aussi nos objectifs et notre méthodologie de recherche pour les atteindre. 10 2. État actuel des recherches De l’époque d’Aristote jusqu’à maintenant, d’innombrables recherches ont été réalisées dans le but de comprendre le mécanisme d’encodage des informations temporelles des langues naturelles. Elles visent essentiellement à répondre à deux questions principales, à savoir : « Comment peut-on décrire la localisation de la situation décrite à l’énoncé sur l’axe temporel ?» (Question relative à la notion du temps) et « Comment l’organisation temporelle interne de la situation est-elle décrite ?» (Question relative à l’aspect)3. Dans leurs travaux sur la temporalité dans les langues, les linguistes se sont mis d’accord pour dire que la localisation d’un intervalle sur l’axe du temps doit se faire à l’aide d’un autre servant de référence. Ce dernier peut être soit celui de l’énonciation, soit celui d’un événement bien défini par les interlocuteurs. Dans le deuxième cas, il peut s’agir d’un fait culturellement connu tel que la naissance de Jésus Christ (localisation par calendrier) ou bien d’une situation déterminée par le contexte (localisation par les relations anaphoriques temporelles). Pour positionner un intervalle sur l’axe temporel, les langues ont deux moyens explicites qui sont les moyens lexicaux et grammaticaux. Les premiers comprennent les mots, les adverbes, les circonstanciels de temps comme il y a deux jours, l’année dernière, quand je suis entré... Les deuxièmes sont les marques d’une utilisation systématique et obligatoire. Dans la plupart des cas, ces marques sont portées par la morphologie verbale. Les oppositions entre entra/entrera en français ou did /will do en anglais en sont des exemples. Les linguistes tels que Reichenbach (1947), Comrie (1976, 1985) ou Co Vet (1980) ont conclu que le temps concerne la représentation des relations temporelles de la situation de l’énoncé avec le point de référence. En fonction de la nature du point de référence, les temps verbaux sont divisés en temps absolus et temps relatifs. Nous avons affaire aux temps absolus si le point de référence (R) est le moment de l’énonciation (S). Dans le cas contraire, il s’agit des temps relatifs. Pour la deuxième question concernant l’aspect, les linguistes distinguent l’aspect lexical de l’aspect grammatical. Le premier concerne les caractéristiques temporelles 3 Ces deux questions sont soulevées par Gustave. Guillaume (1929) 11 inhérentes à la représentation sémantique formées à partir de l’ensemble d’éléments linguistiques décrivant la situation-concept. Cette représentation sémantique est appelée dorénavant le procès. Dans notre travail, ce dernier est mis entre les parenthèses (<>) et écrit en majuscule. Les linguistes distinguent six caractéristiques temporelles internes du procès qui sont : télique/non télique, dynamique/non dynamique et durative/non durative. L’aspect grammatical est défini comme les caractéristiques temporelles de l’occurrence concrète du procès en question. Avec la morphologie verbale, les adverbes, les périphrases, les particules, les affixes… un procès peut être décrit par une multitude d’aspects comme imminent : (1) Il est sur le point de parler ou répétitif : (2) (À ce temps-là), il racontait souvent son histoire ou en cours (imperfectif) : (3) Il travaille ou achevé (perfectif) : (4) Il a mangé sa part. Suivant les investigations linguistiques, l’imperfectif et le perfectif sont les deux aspects les plus saillants. Presque toutes les langues ont des moyens particuliers pour représenter ces informations. Les linguistes insistent sur la différence entre le temps et l’aspect grammatical. En fait, le temps représente les relations temporelles entre le point du procès (E) et le point de référence. Ces relations comprennent l’antériorité, la postériorité, la simultanéité. Autrement dit, le temps est DÉICTIQUE. Par contre, le choix des aspects grammaticaux est totalement indépendant de la position du procès sur l’axe temporel. En d’autres termes, l’aspect grammatical est NON DÉICTIQUE. Concernant l’aspect lexical, en se basant sur trois oppositions de caractéristiques qui sont télique/ non télique (atélique) ; dynamique/ non dynamique (statique) ; duratif/ non duratif (ponctuel), Z. Vendler (1967 ) a divisé les procès en quatre catégories : état, activité, accomplissement, achèvement (réalisation instantanée). 12 Les définitions du temps, de l’aspect lexical et de l’aspect grammatical ainsi que la conception de temps présentées ci-dessus forment souvent la base théorique des études sur la temporalité des langues comme le français et le vietnamien. Pour le français, les conclusions sont assez unanimes. Les linguistes se sont mis d’accord que les formes verbales de l’indicatif en français servent à représenter à la fois les valeurs temporelles et les valeurs aspectuelles. Par exemple : la forme de l’imparfait marque le temps du passé et l’aspect grammatical de l’imperfectif, la forme du présent de l’indicatif sert à marquer essentiellement le temps du présent et l’aspect de l’imperfectif.4 Cependant, ces théories sont contestées sur plusieurs points. En premier lieu, la définition du temps (temps linguistique) comme les relations entre le point du procès décrit (E) et le point de référence (soit celui de l’énonciation (S), soit celui défini suivant le contexte) est remise en cause. Suivant cette définition, les temps verbaux français comme l’imparfait, le passé composé… sont des temps absolus du passé. Ces formes verbales servent donc à représenter l’antériorité du E par rapport au S. En leur présence, le procès est interprété comme ayant lieu avant le moment de l’énonciation. La situation décrite par le procès de l’énoncé (5) ci-dessous : (5) Quand je suis entré, il travaillait dans le jardin. devrait être interprétée comme prenant fin avant le moment de l’énonciation. Cependant, cette interprétation n’est pas la seule. Le procès peut durer et inclure le S car on peut toujours ajouter « il y travaille toujours ». La distinction entre les temps absolus et les temps relatifs est aussi un des sujets de discussion. Est-elle bien justifiée dans l’exemple suivant ? (6) Elle naîtra, fera de bonnes études, s’occupera de la politique et évitera la troisième guerre mondiale. On dira après sa mort qu’elle fut une héroïne. (7) Dans 20 ans, on comprendra que Robert Kennedy fut un homme politique plus important que son frère5. 4 Nous ferons une étude plus détaillée des formes verbales de l’indicatif en français dans la partie portant sur la temporalité en français. 5 Les deux exemples (6) et (7) sont repris de C. Vetters (1996). D’après ce linguiste, le procès a lieu avant le procès . C’est en insistant sur cette relation que le locuteur a choisi le temps du passé. La même explication peut être appliquée pour l’exemple (7). 13 Suivant le contexte, les procès et devraient avoir lieu après l’énonciation. La forme verbale choisie devrait être le futur simple : « on dira après sa mort qu’elle sera une héroïne ». Par contre, le locuteur a choisi le passé simple. Pour l’aspect grammatical, plusieurs linguistes contestent qu’il représente les différentes modes de présentation du procès indépendamment de sa relation avec un autre point sur l’axe temporel. Ainsi, l’énoncé «Il travaillait » marque-t-il l’aspect imperfectif. En choisissant l’imparfait, le locuteur présente le procès comme en cours. En fait, pour juger donc un procès en cours ou terminé, il faut le mettre en comparaison avec un autre moment servant de repère. La catégorisation des procès proposés par Vendler (op.cit.) est aussi critiquée pour ne pas rendre compte du fait qu’un procès peut changer de caractéristiques temporelles en fonction du contexte ou des éléments lexicaux entourant le verbe. Les procès tels que de l’énoncé (8) ci-dessous sont, par conséquent, qualifiés de non téliques (8) Elle court. Pourtant, le fait de préciser le parcours par l’ajout du complément « un km » rend ce procès télique. Le même résultat est constaté s’il s’agit d’un contexte énonciatif d’un fait habituel. Par rapport au français, les études sur la temporalité en vietnamien sont très limitées. De plus, les auteurs de ces recherches ne sont pas du même avis, mais souvent opposées. La détermination des moyens de représentation temporelle et aspectuelle ainsi que la nature et la valeur des moyens de représentation temporelles en vietnamien reste ainsi encore ouverte. Néanmoins, les linguistes sont unanimes à reconnaître que les mots comme « đã », « sẽ », « đang », « rồi »...ont des valeurs temporelles. Cependant, une autre question se pose, s’agit-il des mots grammaticaux ou des moyens lexicaux ? En fait, l’emploi de ces mots est assez compliqué. Dans certains cas, il est optionnel comme « Cô ấy mệt »/ « Cô ấy đang mệt ». Le mot « đang » dans l’énoncé « Cô ấy đang mệt » a plutôt la valeur emphatique que celle d’expression temporelle. Par contre, dans certains cas, les marqueurs sont obligatoires comme « Khi tôi đến, anh ấy đã đi rồi ». Les conclusions sur les valeurs des marqueurs constituent un autre sujet de recherche. En effet, pour certains linguistes, les mots comme « đã », « đang », « sẽ » servent à marquer les différences temporelles. Le mot « đã » marque le passé, « đang » le 14 présent et « sẽ » le futur. Par contre, d’autres chercheurs soutiennent l’hypothèse des marqueurs aspectuels. Pour ces derniers, ces trois mots représentent respectivement les aspects perfectif, imperfectif et le prospectif. Une autre limite des études précédentes sur la temporalité est leur méthodologie de travail. En effet, ces linguistes s’intéressant à cette problématique se contentent souvent des exemples concrets repris hors du contexte ou fabriqués par eux-mêmes alors qu’il vaut mieux vérifier leurs conclusions par une analyse du corpus. 3. Questions de recherche À partir de nos remarques susmentionnées relatives aux recherches existantes sur la temporalité en français et en vietnamien, nous nous posons les questions suivantes : (1)Quel est le mécanisme de représentation temporelle et aspectuelle en français et en vietnamien ? (2) Quelles sont les divergences et les convergences de ces deux systèmes en matière de représentation temporelle et aspectuelle ? 4. Objectifs et délimitation de l’étude Dans le cadre de ce travail, notre objectif est d’étudier la temporalité en français et en vietnamien et d’en faire la comparaison pour en tirer des observations et remarques pertinentes afin de proposer des traitements optimaux à chaque cas. Cependant, nous sommes conscient que ce sujet d’étude couvrira un champ de travail très vaste car les informations temporelles d’une langue sont représentées par la combinaison de divers moyens linguistiques dont les modes verbaux, les formes verbales, les suffixes, les préfixes (les particules préverbales, en cas de langues non flexionnelles comme le vietnamien, le chinois), les circonstanciels temporels, etc. Ces moyens se combinent d’après des mécanismes bien spécifiques de chaque langue qui définissent la compatibilité entre les éléments ainsi que leurs interprétations. Considérons l’exemple (9) en français et sa traduction en vietnamien (10). (9) *Il travaillait dans le jardin en deux heures (10) *Anh ấy đang làm việc trong vườn trong vòng hai giờ Nous voyons que le procès télique marqué par « en deux heures » ou « trong vòng hai giờ» est incompatible avec la forme verbale de l’imparfait et le marqueur « đang » en vietnamien. 15 De plus, les relations interphrastiques et les informations énonciatives participent aussi à la représentation et à l’interprétation temporelle. L’exemple suivant confirme encore une fois ces constatations : (11) Paul a fait tomber la bouteille de la table. Elle est cassée en plusieurs pièces (12) Paul écrit. (Bien qu’au moment de l’énonciation, Paul soit en train de parler avec quelqu’un d’autre.) Pour l’exemple (11), nous comprenons que le procès « la bouteille est cassée en plusieurs pièces » est la conséquence de l’action « Pierre a fait tomber la bouteille » et qu’il a lieu après l’action accomplie par Pierre. L’énoncé (12) est accepté lorsque Pierre est écrivain. Il vit de son plume. En raison de la complexité du sujet de travail, nous sommes obligés d’en fixer des limites. Par conséquent, concernant la temporalité en français, nous travaillons essentiellement sur les formes verbales de l’indicatif. Notre choix est expliqué par le fait que l’indicatif représente la majorité des énoncés. Toutefois, nous ne réfutons pas la valeur temporelle des autres modes verbaux tels que le conditionnel ou le subjonctif. En effet, l’emploi du conditionnel en tant que marqueur du futur ou le futur antérieur dans le passé des exemples ci-dessous en sont des preuves. (13) Sara a appris hier que son frère l'accompagnerait chez ses parents (14) Martine croyait que Frédéric serait parti du bureau à cette heure Cependant, dans ces deux exemples précités, la valeur modale de probabilité a une fonction plus prépondérante que la valeur temporelle. Pour le français, nous proposerons ainsi de faire une description des valeurs temporelles, aspectuelles des formes verbales de l’indicatif et de prévoir leur interprétations dérivées lors de leurs combinaisons avec différents types de procès, des catégories de circonstanciels de temps ainsi que des variations contextuelles. Ces variations peuvent être des informations contextuelles ou des relations de cause- conséquence…En ce qui concerne le vietnamien, comme cette langue n’a pas de formes verbales, nous déterminerons les valeurs temporelles et aspectuelles des marqueurs ayant une fréquence d’emploi importante tels que « đã », « đang », « sẽ ». Ce choix est principalement motivé par le fait que la plupart des linguistes ont reconnu leurs valeurs de représentation 16 temporelle et aspectuelle. Leurs interprétations typiques ainsi que dérivées dans un cadre interactionnel avec les informations pragmatiques de l’énoncé retiennent également notre attention lors de notre analyse. L’absence de ces marqueurs fait, d’autre part, l’objet de notre recherche. Dans ces cas, nous essayerons d’expliquer comment les informations temporelles et aspectuelles sont représentées sans recourir aux moyens de représentation explicites. À la différence des travaux précédents, nous adopterons l’approche pragmaticosémantique. Autrement dit, au lieu de porter notre attention sur les facteurs lexicaux et sémantiques servant à représenter les informations temporelles et aspectuelles dans ces deux langues, nous essayons de les mettre en relation interactive et de déterminer leur mécanisme de fonctionnement. Nous approfondirons notre étude en comparant les conclusions obtenues des analyses de temporalité en vietnamien et en français. Nous espérons déterminer en premier lieu les divergences et les convergences en matière d’expression temporelle en français et en vietnamien. Dans la suite, nous essayerons de trouver des équivalences dans ces deux langues. Nous comprenons que ces équivalences ne sont pas totales en raison de plusieurs différences dont celles de la pensée, de la morphologie, de la culture, de moyens d’expression. Cependant, la comparaison interlinguistique nous permet de mieux comprendre le fonctionnement du système de représentation temporelle et aspectuelle de ces deux langues. De plus, elle peut être utile pour les étudiants lors de leur apprentissage du français langue étrangère et pour la traduction du français en vietnamien et du vietnamien en français. 5. Structure de la thèse Notre étude se divise en quatre parties. La première est réservée aux questions théoriques sur la temporalité des langues. Nous y présenterons les conceptions traditionnelles du temps, de l’aspect lexical, de l’aspect grammatical et les nôtres sur ces conceptions. Nous y expliquerons aussi pourquoi nous choisirons l’approche pragmaticosémantique pour notre étude. Dans les deuxième et troisième parties, à partir de nos définitions du temps, de l’aspect lexical et de l’aspect grammatical, nous traiterons des questions de temporalité en français et en vietnamien. Les conclusions tirées des études sur la temporalité dans ces deux langues seront vérifiées par l’analyse des corpus avec des échantillons repris des textes authentiques en ces deux langues. La dernière partie sera réservée à l’étude 17
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